Une équipe de biologistes a découvert l’origine d’un mystérieux bruit de pet sous-marin : ce son aigu est provoqué par des bulles sortant de l’anus des harengs. On ignorait jusque-là que les poissons émettaient des sons avec cette partie de leur anatomie et qu’ils produisaient des bruits de fréquence aussi élevée.
“On dirait vraiment un pet aigu”, commente Ben Wilson, de l’université de Colombie-Britannique à Vancouver, au Canada. Le chercheur et son équipe ne savent pas exactement pourquoi les harengs font ce bruit, mais les recherches préliminaires laissent entendre que ce phénomène pourrait expliquer comment les bancs parviennent à rester groupés la nuit. Pour Dennis Higgs, spécialiste en acoustique sous-marine de l’université de Winsor, dans l’Ontario, cette découverte est “étonnante et intéressante”. Ce serait selon lui la première fois qu’on verrait un poisson utiliser de hautes fréquences pour communiquer. Au départ, les chercheurs pensèrent que le son aigu qu’ils avaient détecté provenait de la vessie natatoire, une poche d’air située dans l’abdomen. Cette poche se gonfle et se dé-gonfle pour assurer la flottaison de l’animal. Puis ils remarquèrent qu’un filet de bulles s’échappait de l’anus du poisson au moment précis où le bruit se produisait. Ils pensèrent donc que celui-ci était dû à de l’air sortant de la vessie natatoire par l’anus. L’équipe baptisa ce bruit fast repetitive tick (FRT). Mais Wilson fait remarquer que, contrairement aux pets hu-mains, ces sons ne sont probablement pas causés par les gaz de la digestion parce que leur nombre ne change pas quand les poissons sont nourris.
Les chercheurs ont également voulu savoir si les poissons ne pétaient pas de peur, peut-être pour prévenir leurs congénères. Ils les ont donc exposés à une odeur de requin, mais, là encore, ils n’ont constaté aucun changement dans le nombre de FRT.
Trois éléments les ont convaincus que le FRT sert très probablement à communiquer. Premièrement, plus il y a de harengs dans un aquarium, plus on enregistre de FRT par individu. Deuxièmement, les sujets ne font du bruit que la nuit, ce qui indique que ce son leur permet peut-être de se repérer les uns les autres quand ils ne peuvent pas se voir. Enfin, les chercheurs savent que les harengs perçoivent les sons de cette fréquence, ce dont sont incapables la plupart des poissons. Ils pourraient ainsi communiquer sans avertir les prédateurs de leur présence.
Wilson souligne que cette idée n’est qu’une théorie, mais cette découverte est tout de même utile. On pourra ainsi suivre les harengs grâce à leur FRT de la même manière qu’on suit les baleines et les dauphins grâce à leurs cris suraigus. Les pêcheurs pourraient même exploiter cette découverte pour repérer les bancs.