Éradication de milliers d’écrevisses de Louisiane à Chaumont-Gistoux : une première en Belgique

De 6 à 12 centimètres de long, un thorax rouge foncé et de longues pinces typiquement tachetées de petites bosses rouge vif… Voilà à quoi ressemble une écrevisse de Louisiane. Comme le dit son nom, elle est originaire d’Amérique du Nord et a été importée en Wallonie dans les années 90. À l’époque, elle est introduite pour la pêche ou l’alimentation, mais très vite, elle pose problème : cette espèce exotique se reproduit rapidement et est particulièrement nocive pour notre environnement.
À Chaumont-Gistoux, deux étangs privés ont d’ailleurs été colonisés par ces écrevisses ces dernières années. Hugues Vanbellinghen a fait acquisition du terrain qui les accueille en 2017 et il s’est vite rendu compte que quelque chose n’allait pas.
« Un détail, par exemple, on n’entend plus de batracien, explique le propriétaire des étangs. On nous a dit qu’il y a 30 ans, c’était rempli de grenouilles, de crapauds, etc. Mais aujourd’hui on n’en a pratiquement plus« .

Nocives pour l’environnement

En cause : les écrevisses de Louisiane, très envahissantes. Elles peuvent parfois se reproduire plusieurs fois par an dans les eaux très chaudes. Elles mangent notamment les œufs de poissons ou de batraciens et sont aujourd’hui un vrai problème. « Après que les propriétaires ont mis ces écrevisses dans leurs bassins ou leurs étangs, l’eau change de couleur, il n’y a plus de végétation aquatique, il y a moins de poissons, il n’y a plus de batracien. Et on peut voir aussi un réseau de galeries dans les berges ce qui mène à un recul des berges de l’étang et à un effondrement des berges dans les cas les plus graves« , précise Adrien Latli, gestionnaire environnement au SPW-DEMNA (Agriculture, ressources naturelles et environnement).

5000 écrevisses capturées en 2 ans

Dans ces étangs surveillés depuis 2 ans, les équipes d’Adrien ont déjà capturé pas moins de 5000 individus. Il était donc devenu nécessaire d’intervenir. Pour cette grande opération d’éradication, les agents du SPW et des bénévoles ont commencé par pomper l’eau des étangs pour les vider. Pendant que le niveau de l’eau baissait, des pêcheurs ont récupéré les poissons encore présents grâce à des épuisettes électrifiées afin de les assommer pour les mettre à l’abri.
Toutes les écrevisses seront ensuite détruites en espérant trouver tous les individus qui se cacheraient dans la vase ou des galeries. Pour être sûre d’en venir à bout, les étangs devront rester à sec pendant deux ans. Objectif, éradiquer ce foyer pour éviter qu’il ne s’étende. Les écrevisses peuvent en effet sortir des étangs et éventuellement marcher jusqu’à une rivière ce qui serait catastrophique : il serait alors presque impossible de s’en débarrasser.

Une éradication cofinancée par la Commission européenne

Cette opération est une première en Belgique, elle est financée par les régions et la Commission européenne dans le cadre du projet Life – Riparias. Marie Patinet, chargée de communication, précise : « Notre projet vise à optimiser la gestion des espèces exotiques envahissantes, notamment en améliorant la surveillance de ces espèces. On va essayer de les détecter de façon très précoce pour pouvoir agir le plus rapidement possible. On veut agir là où c’est encore possible avant que l’espèce se répartisse partout« .
Chez nous, l’apparition de l’écrevisse de Louisiane a déjà causé la raréfaction de l’espèce endémique d’écrevisses à pattes rouges, la seule présente naturellement en Wallonie. Porteuses d’une maladie originaire d’Amérique du Nord à laquelle elles sont résistantes, elles ont en effet transmis ce champignon aux écrevisses wallonnes.

Le propriétaire des étangs, lui, devra donc être patient. Il pourra à nouveau remplir ses étangs dans 2 ans. Et il ne compte pas récupérer les écrevisses. « On en a déjà grillé quelques-unes, nous confie-t-il, mais elles ne sont pas d’un très grand intérêt culinaire« .

Source : Sarah Heinderyckx – RTBF