Zone rariphotique : des chercheurs découvrent une zone de l’océan inconnue et remplie de poissons
Des scientifiques américains ont découvert (2018) plusieurs milliers de poissons dans une zone de l’océan encore méconnue : la zone rariphotique. À bord d’un petit submersible, les chercheurs ont décelé, 130 à 300 mètres sous la surface de l’eau, pas moins de 71 espèces différentes, parmi lesquelles une trentaine étaient inconnues auparavant.
Elle était encore méconnue, confinée à l’abri de la lumière entre 130 et 300 mètres sous la surface de l’eau. Et pourtant, des chercheurs viennent de déceler une profusion de vie dans cette mystérieuse zone océanique : la zone rariphotique. Ils révèlent l’ampleur de leurs découvertes au cours d’une étude parue le 20 mars 2018 dans la revue Scientific Reports.
Tout a débuté en 2011, alors que des scientifiques du Muséum national d’histoire naturelle des États-Unis et du Smithsonian Tropical Research Institute s’engageaient dans l’aventure du Deep Reef Observation Project, un programme d’observations sous-marines mené au large des côtes de Curaçao, au sud des Caraïbes.
À bord du Curasub – un submersible capable de transporter cinq passagers à 309 mètres de profondeur pendant plus de huit heures – les chercheurs sont parvenus à accéder à l’une des zones de l’océan les plus difficiles d’accès. Une prouesse loin d’être vaine.
Plusieurs milliers de spécimens
Dans ces profondeurs obscures, les explorateurs sous-marins ont en effet comptabilisé pas moins de 4.500 spécimens de poissons, représentants de 71 espèces différentes. Plus incroyable encore, sur seulement 0,2 kilomètre carré se cachaient une trentaine d’espèces nouvelles de poissons et d’invertébrés et six nouveaux genres encore inconnus.
« Environ un poisson sur cinq que nous découvrons dans la zone rariphotique des Caraïbes est une nouvelle espèce », se félicite le co-auteur de l’étude Ross Robertson, biologiste marin au Smithsonian Tropical Research Institute. La plupart des espèces décelées sont apparentées à d’autres, typiques de la zone récifale située plus près de la surface baptisée « zone mésophotique ».
Comprise entre 40 et 150 mètres de profondeur, cette zone est éclairée d’une faible lueur, idéale pour permettre aux coraux de se développer. Les spécialistes pensaient que la zone mésophotique représentait une limite infranchissable pour la faune marine. Une idée désormais battue en brèche par les scientifiques à l’origine de ces révélations.
Une conséquence du changement climatique
Pour expliquer la découverte inattendue à ces profondeurs de dizaines d’espèces inconnues, les chercheurs avancent un argument : celui du changement climatique. Responsable du réchauffement des eaux, et d’une destruction des récifs coralliens, le phénomène aurait contraint la faune sous-marine à se réfugier plus en profondeur.
De formes variées et aux teintes chatoyantes, les invertébrés et les poissons qui peuplent la zone rariphotique nécessitent encore d’être étudiés et décrits avec précision. « Pour l’instant, mon préféré est Haptoclinus dropi », glisse Ross Robertson, un petit poisson de deux centimètres de long, membre de la famille des blennies et doté de quatre nageoires.
Au-delà de la richesse biologique qu’elle abrite, la zone rariphotique bouleverse également la stratification des profondeurs sous-marines établie jusqu’à présent. Les spécialistes pensaient en effet que la « zone aphotique », privée de lumière, succédait immédiatement à la zone mésophotique, plus proche de la surface. Entre ces deux portions de la colonne d’eau s’intercale désormais la zone rariphotique, sombre, certes, mais riche d’une biodiversité insoupçonnée.
« On estime que 95% des zones habitables de notre planète se situent dans l’océan, pourtant seule une fraction de cet espace a été explorée », déplore l’auteure principale de l’étude Carole Baldwin, du Muséum national d’histoire naturelle des États-Unis. « Nous espérons qu’en nommant la zone récifale profonde rariphotique, nous allons attirer l’attention sur le besoin de poursuivre l’exploration des récifs profonds« . De quoi percer les secrets des habitants de ces profondeurs sous-marines, malgré tous leurs efforts de discrétion !